vendredi 17 juin 2011

De l'importance de l'actualité dans l'enseignement supérieur

Même si l’ouverture sociale et culturelle en Grande École d’Ingénieurs progresse rapidement, cette évolution n’est pas homogène. La place accordée aux entreprises, aux conférences ou aux débats s’améliore, complétant ainsi la vision macroscopique des cours magistraux par une vision intermédiaire. Ce qu’il manque, c’est une vision microscopique, les exemples qui viendront illustrer, voire éclairer, cette vision du monde que constitue l’enseignement.


Se tenir au courant de l’actualité, c’est d’abord connaître le monde dans lequel on vit. S’ancrer dans la réalité n’est pas si simple dans le microcosme des Grandes Écoles. Celles-ci sont sensées être le lieu où se forge notre vision du monde, ce qui n'est pas une mince affaire étant donné que le seul lien dans l'enseignement en prépa scientifique avec le monde réel et l'actualité est... le cours de langue. En arrivant en École, s'intéresser à ce qui se passe autour de nous est donc loin d'être un réflexe. Souvent, des quotidiens nationaux en version papier ou des abonnements électroniques sont disponibles gratuitement dans les établissements. La mise à disposition des moyens n'est donc pas un problème, encore faut-il donner l'envie de lire qui, finalement, permettra de replacer l'enseignement dans son contexte : un fait divers, une actualité sur une entreprise ou encore la présentation d'un projet d'avenir pourront ainsi être mis tout naturellement en relation avec les cours de mécanique des fluides, d'aménagement ou de marketing suivis le jour même. Ceci permet non seulement de voir l'actualité sous un œil neuf, mais aussi de trouver du sens ou de l'intérêt dans des cours qui semblent parfois déconnectés de la réalité. Le cours de droit prend ainsi tout son sens lorsqu'il est illustré par les déboires judiciaires d'un homme politique ou par un conflit de propriété intellectuelle entre deux entreprises. Le cours d'économie n'a que plus d'attrait quand il permet de comprendre les problèmes rencontrés par la Grèce et l'Irlande.


L'actualité est également un formidable outil de développement de l'esprit critique. Pour cela, nul besoin de s'efforcer à chercher la moindre faille dans le raisonnement du journaliste. Dans un premier temps, tout semble cohérent, les articles sont vus comme des vecteurs d'une information qui nous arrive intacte. Puis, un jour, une grossière faute de conjugaison dans le titre d'un article amène à se dire que, finalement, l'article n'est pas exempt de défauts, et que ce que dit l'auteur est susceptible d'être biaisé, incomplet ou inexact. Au bout de quelques semaines, les erreurs commencent à se révéler de plus en plus nombreuses dans les articles, les détails passent de moins en moins inaperçus, comme lorsqu'il était affirmé, à l'occasion de l'incendie de l'Elysée-Montmartre, que le bâtiment a été construit en 1807 sur une structure de Gustave Eiffel – toute personne sachant que la Tour Eiffel a été bâtie pour l'Exposition Universelle de 1889 aura de sérieux doutes au sujet de cette affirmation. Ainsi, au bout de quelques mois, sans avoir l'impression d'avoir fourni le moindre effort, on se découvre un sens critique aiguisé, apte à remettre en question les informations qui nous sont servies. Ce sens critique permet alors de pouvoir faire la part des choses dans ce qui nous est proposé ou exposé, mais également d'être informé du contexte dans lequel nous évoluons.


Bien. Mais à quoi cela sert-il ?


D'une part, à être un citoyen plus éclairé, dans ses choix et dans ses votes. D'autre part, à s'affirmer en tant qu'individu : dans des négociations ou des débats, s'appuyer sur l'actualité et des faits permet toujours d'opposer des arguments palpables à son interlocuteur. D'une manière plus intime, nos choix personnels ou choix de carrière seront toujours plus réfléchis : est-ce judicieux de se diriger dans une filière en forte perte de vitesse ? Pourtant, il y a forcément un revers de la médaille. En l'occurrence, il s'agit en quelque sorte d'une "déformation professionnelle", puisque le monde qui nous entoure est vu à travers le prisme de cette actualité à laquelle on s'intéresse. Comme lorsque dans le métro, on pense à ce que va devenir la ligne 14 avec le Grand Paris, ou lorsqu'en week-end à la Rochelle, on se demande quelles sont les caractéristiques du marché des grues portuaires, ses acteurs, la concurrence, le modèle économique...


Il reste maintenant une question en suspens : comment ? Le premier contact avec l'actualité, ce sont les gros titres que l'on peut lire dans la rue. Evidemment, cette approche est assez limitée. Passons en revue les différents médias existants :

· Parmi les médias très largement utilisés, on peut compter la radio et la télévision - pour ma part, alors que j'écoutais régulièrement France Info en prépa, j'ai laissé de côté ces deux médias, qui ne donnent qu'un aperçu des gros titres sans permettre d'aller voir plus en détails les sujets qui nous intéressent ; sans parler des images purement décorative la plupart du temps à la télévision ;

· Ensuite, vient la presse papier, nationale ou régionale, ainsi que la presse électronique. En ce qui me concerne, je suis abonné aux newsletter LeMonde.fr et lesechos.fr, et je passe également régulièrement sur les sites mêmes. Je n'ai pas pris pour l'instant d'abonnement payant à ces deux sites, l'"actuphagie" m'étant venue assez récemment, je trouve largement de quoi faire avec ceux-ci ;

· Dans le métro, je lis aussi régulièrement Métro, Direct Matin ou 20 minutes, soit pour être au courant de l'actualité parisienne, soit pour repérer les titres que j'irai voir plus en détails sur internet dans la journée ;

· Mais l'actualité, ce n'est pas que la politique, la société, les faits divers ou l'économie, c'est aussi et surtout ce qui nous intéresse. Je passe donc régulièrement sur Allociné, et occasionnellement sur 2kmusic et jeuxvideo.com ;

· Et comme l'actualité peut tout autant prêter à (sou)rire qu'à réfléchir, je suis un inconditionnel du blog l'Actu en patates de Martin Vidberg.

J'espère avoir ici donné matière à découvrir un peu le monde qui nous entoure. Mais qu'en est-il de ceux qui ne seraient pas prêts à faire cet effort, ou n'y seraient pas sensibilisés ? Une infinité de solutions sont envisageables en école ou université, plus ou moins difficiles à mettre place. Je précise qu'il s'agit de vœux pieux et de pistes de réflexion, puisque je n'ai jamais eu le temps ni l'opportunité de mettre en œuvre ces propositions :

· On peut tout d'abord envisager une revue de presse présentée une à deux fois par semaine par un groupe d'élèves chaque fois différent, où chacun présente un sujet d'actualité qu'il a envie de partager. Une sorte de journal "live" ;

· Si l'établissement publie un journal, rien n'empêche d'y inclure une partie "actualités", il est même envisageable de créer un journal pour les établissements dotés d'une chaîne de télévision ou d'une station radio ;

· Un groupe d'élèves motivé par le sujet peut proposer à ceux qui sont intéressés de s'abonner à une newsletter d'actualité, qui paraîtrait une à deux fois par semaine, présentant un patchwork d'articles trouvés sur internet et les liens pour aller plus loin.

Le maître mot en la matière est "partage". L'avantage incontestable de l'information par les étudiants pour les étudiants est l'assurance de traiter de sujets qui intéressent la plupart des personnes visées, soit parce qu'ils concernent le domaine d'étude de l'établissement, soit parce qu'ils touchent directement aux centres d'intérêts des étudiants ou à leur localisation géographique.

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